Dans son dernier numéro (n° 91), Forêt-Mail rapporte la synthèse de trois études très intéressantes au sujet des peuplements mélangés.

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L’effet du climat et du mélange sur la productivité des peuplements d’épicéa et hêtre [1132]

Le mélange d’essences est réputé pour stabiliser la productivité, améliorer la résilience et minimiser les risques de tous types. Cependant, la recherche scientifique étudiant l’effet du mélange sur la productivité et l’utilisation des ressources donne jusqu’à présent des résultats relativement incohérents.

Une étude réalisée près de Munich en Allemagne a analysé l’influence du mélange d’essences sur la productivité des peuplements, en prenant en compte les conditions climatiques ainsi que différents modèles d’agencement du mélange (répartition spatiale des essences au sein du peuplement, mélange par groupe versus mélange intime).

Un total de six peuplements, quatre peuplements purs (deux pessières et deux hêtraies) ainsi que deux peuplements mélangés hêtre-épicéa, ont fait l’objet de mesures pendant une dizaine d’années. Parmi les deux peuplements mélangés, l’un présente un agencement par groupe et l’autre présente un mélange pied à pied.

Les résultats de l’étude peuvent se résumer de la manière suivante :

  1. Le mélange n’a aucun effet sur la productivité primaire annuelle du peuplement lorsque les deux essences se trouvent en mélange par groupe. Par contre, cette productivité augmente de 37 % lorsque le mélange est intime (pied à pied). Cette constatation s’explique par la meilleure efficacité de l’utilisation de l’eau et de la lumière en mélange intime.
  2. Des conditions climatiques favorables augmentent la productivité des peuplements mélangés par rapport aux peuplements purs. Par contre le bénéfice du mélange s’annule en cas de stress hydrique.
  3. Une interaction entre l’agencement du mélange et les conditions climatiques variables a été identifiée : l’utilisation des ressources (lumière et eau) est améliorée en mélange intime au cours des années à conditions climatiques favorables. Cependant, en cas de conditions climatiques défavorables, l’agencement du mélange joue un rôle moins important en terme de productivité. [C.S.]

Pretzsch H., Dieler J., Seifert T., Rötzer T. [2012]. Climate effects on productivity and resource-use efficiency of Norway spruce (Picea abies) and European beech (Fagus sylvatica) in stands with different spatial mixing patterns. Trees – Structure and Function 26 : 1343-1360 (18 p., 7 fig., 6 tab., 71 réf.).

L’effet du mélange d’essences sur la production de racines fines [1133]

L’amélioration de la productivité des peuplements mélangés par rapport aux peuplements purs s’explique généralement par l’utilisation complémentaire des ressources. La différenciation verticale des niches souterraines est une hypothèse très souvent avancée. Cependant, la plupart des études analysent la relation entre la productivité et la différenciation verticale des niches souterraines dans des peuplements mûrs ou d’âge intermédiaire.

Une étude en Allemagne s’est focalisée sur la problématique en peuplements jeunes, dans lesquels l’occupation de l’espace souterrain par les racines est en cours. L’objectif de l’étude était d’analyser comment se comportent les racines fines (diamètre inférieur à 2 mm) dans un jeune peuplement mélangé âgé de 5-6 ans.

Le peuplement étudié est issu d’une plantation de 2003 de quatre essences en mélange (épicéa, douglas, hêtre et chêne sessile). Des échantillons de sol (carottes) de 30 cm de profondeur ont été prélevés au pied des plants pour estimer la production de racines fines en fonction de l’environnement direct des plants.

Les résultats de l’étude montrent entre autres, que la production de racines fines des essences dominantes (épicéa, douglas) est plus grande en mélange qu’en peuplement pur. De manière plus détaillée, les auteurs ont observé que les plants d’épicéa produisent plus de racines dans les couches supérieures du sol (0 à 15 cm) alors que les racines des plants de douglas sont plus abondantes entre 15 et 30 cm.

De manière générale, l’étude indique que le mélange d’essences provoque une augmentation considérable de la production, de la distribution verticale et du renouvellement des racines fines. De plus, ce phénomène s’accentue avec la diversité en essences du mélange. [C.S.]

Lei p., Scherer-Lorenzen M., Bauhus J. [2012]. The effect of tree species diversity on fine-root production in a young temperate forest. Oecologia 169 : 1105-1115 (11 p., 4 fig., 2 tab., 6 réf.).

Parlons un peu de mycosylviculture [1135]

La mycosylviculture est un terme qui met en évidence le lien entre les champignons et l’écosystème forestier : l’influence pour la gestion forestière peut s’avérer importante. Les champignons servent en effet d’interface entre le sol et les arbres, grâce à leur mycélium, avec d’importants rôles dans la résilience des écosystèmes, mais aussi dans la nutrition des plantes et le recyclage de la matière organique.

Dans certaines régions européennes, la production de champignon peut s’avérer importante financièrement pour le propriétaire. Un projet européen est en développement dans le sud-ouest de la France, en Espagne et au Portugal, là où la production de cèpes de Bordeaux atteint par exemple :

  • 40 kg en moyenne par hectare et par an sur une pinède espagnole de 12 000 hectares ;
  • ou encore 15 kg par hectare et par an dans des forêts feuillues mélangées des Hautes-Pyrénées.

La mycosylviculture telle qu’elle est proposée dans le sud-ouest de l’Europe, propose ainsi plusieurs améliorations dans le but d’optimiser le fonctionnement des écosystèmes :

  • des forêts mélangées : la diversité d’essences favorise la diversité de champignons. Le fonctionnement de l’écosystème est alors amélioré : meilleure résilience, meilleur recyclage des éléments nutritifs et meilleure efficacité des systèmes racinaires. Il faut évidemment favoriser les essences-hôtes des champignons comestibles recherchés ;
  • des forêts avec présence de plusieurs âges : le système irrégulier s’avère plus intéressant pour la production de champignons ;
  • des forêts à faciès différents selon les expositions en cas de pentes ;
  • une volonté de laisser du bois mort en forêt, ce qui favorise les micro-habitats, propices aux fructifications de champignons.

Enfin, la production de champignons peut être particulièrement intéressante dans les sols peu fertiles : les sols peu profonds ou avec des problèmes de circulation d’eau. Cependant, ces sols doivent avoir une bonne porosité et un cycle de la matière organique qui fonctionne bien. Les sols ayant subi un tassement ou présentant une importante accumulation de matière organique sont dès lors peu favorables à la production de champignons. [B. de P.]

Rondet J. [2012]. La mycosylviculture. Forêt de France 556 : 24-27 (4 p.).

 

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